Les systèmes modernes de signalisation ferroviaire représentent une innovation complexe et importante pour les infrastructures ferroviaires. Quatre de nos experts en signalisation ferroviaire, Jon Bisignano, Kuljinder Singh, Steeve Bissereth et Berhane Tadese, discutent de différents aspects, des progrès technologiques et des défis liés à la conception et au maintien des systèmes de signalisation, qui veillent à la sécurité et à l’efficacité des voies ferrées.

Quels composants principaux constituent un système moderne de signalisation de trains ? Comment fonctionnent-ils pour assurer des activités ferroviaires sécuritaires et efficaces ?

Berhane Tadese, ingénieur principal en signalisation : J’ai participé à plusieurs projets liés aux systèmes de signalisation ferroviaire pendant que je travaillais à la New York City Transit Authority (NYCTA).  Cela m’a permis de comprendre en profondeur les aspects clés d’un système moderne de commande des trains et pourquoi la NYCTA a choisi le système de commande des trains par télécommunications (CBTC) pour son réseau de métro.  Le CBTC est un système de signalisation de pointe conçu pour les réseaux de métro, et utilise une communication radio bidirectionnelle entre les trains, que l’on appelle aussi contrôles intelligents de trains et contrôleurs de zone. Les systèmes de CBTC sont habituellement dotés de fonctionnalités comme les contrôleurs de bordure des voies, les transpondeurs et leurs antennes, et les équipements redondants. Outre ces systèmes modernes, le système de détection en voie auxiliaire a remplacé le système d’enclenchement tout relais par un poste d’aiguillage informatisé.

Les systèmes informatisés de détection de l’état des aiguillages fournissent des informations au CBTC pour suivre le mouvement des trains à l’intérieur de la limite du territoire touché. Pour cette raison, le poste d’aiguillage informatisé est traité lors de la conception en tant qu’un système de commande des trains moderne intégré, qui propose aussi des fonctions d’enclenchement de manière vitale et à sécurité intrinsèque. Le système contrôle les équipements en bordure de la voie, comme les feux de circulation, les arrêts automatiques électriques, la manipulation des aiguillages de manière sécuritaire. Il gère également les acteurs d’essieux et les circuits de voie traditionnels comme la détection de train, en plus de fournir le support pour les systèmes complexes de la signalisation ferroviaire avec une logique informatique prouvée. Ce qui est intéressant, c’est la possibilité de localiser les trains de manière précise à l’aide des équipements en redondance installés à bord, indépendants des acteurs d’essieux et des circuits de voie.

Les contrôleurs de zone et les systèmes d’avertissement collaborent harmonieusement afin de gérer les mouvements sécuritaires des trains, et affichent l’information dans un centre de contrôle centralisé pour les contrôleurs de la circulation ferroviaire.  En général, le contrôleur de zone fonctionne en détectant le passage des trains CBTC grâce à un transpondeur, puis en transmet des messages par radio entre l’équipement redondant et les contrôleurs de zone en bordure de voie. Ces systèmes interconnectés renforcent la sécurité, réduisent des intervalles entre les trains, permettent une flexibilité opérationnelle et diminuent le coût d’entretien grâce à un besoin moindre d’équipement de terrain. L’autre sous-système, la supervision automatique des trains (ATS), fournit un contrôle en surveillant et en gérant les opérations depuis un emplacement centralisé, appelé centre de contrôle ferroviaire, ou depuis d’autres emplacements dans le système de métro NYCT où des postes de travail distants sont connectés au système CBTC-ATS. L’ATS offre d’autres fonctionnalités, telles que le suivi des trains, l’horaire de répartition automatique, et de nombreux autres avantages pour gérer des réseaux de voies de métro complexes, optimisant le débit, le contrôle et la flexibilité.

De quelle manière les ingénieures et ingénieurs prennent-ils en compte des facteurs tels que la vitesse du train, le tracé de la voie ferrée et la densité de trains lors de la conception et de l’intégration de systèmes de signalisation ferroviaire ?

Steeve Bissereth, ingénieur en signalisation La configuration civile et de la voie, les caractéristiques du train et les opérations prévues sont des informations cruciales pour la conception de tout système de signalisation. Lorsque l’on évoque l’amélioration des voies ferrées grâce à des outils numériques, il est inévitablement question d’optimiser leur sécurité.

De nos jours, les logiciels utilisés pour la conception des systèmes de signalisation peuvent être très détaillés. On peut y simuler l’architecture des stations, des fonctions spécifiques des contrôleurs en bordure de voie et encore plus. Que l’on intègre un système de signalisation en cabine, des cantons fixes, un contrôle automatique des trains, un système de commande intégrale des trains ou un système de commande communicants pour les trains, les simulateurs d’aujourd’hui peuvent reproduire la plupart des aspects du tracé d’une voie ferrée, de la configuration de la voie ou l’équipement de soutien. Effectuer des essais en simulation offre aussi la flexibilité de créer divers scénarios dans un environnement contrôlé, réduisant ainsi le risque de perturbations du monde réel et offrant l’occasion d’une formation efficace sans affecter les opérations.

Lorsque l’on conçoit et intègre un système de signalisation ferroviaire, voici quelques facteurs clés que l’on doit prendre en compte :

  • Topologie de la voie : la complexité du tracé d’une voie ferrée, dont les branchements, les liaisons, les courbes, les voies d’évitement, les voies ferrées simples ou doubles, peut avoir un impact sur le placement et la conception de la signalisation.
  • Vitesse du train : les vitesses de circulation sont généralement déterminées par la distance de visibilité et la conception des aspects de signaux pour permettre des distances de freinage sûres. On prend en considération les conditions de visibilité, les chemins de freinage et la courbure des voies.
  • Positionnement de la signalisation : on place les signaux de manière stratégique afin de laisser un temps d’annonce assez long pour que les chefs de train réagissent en conséquence.
  • Systèmes de communication : ces derniers jouent un rôle essentiel en permettant la transmission de données en temps réel entre les trains et l’équipement de soutien. Ils sont également essentiels dans le relais d’informations, comme la position exacte d’un train, les défaillances des systèmes en bordure de la voie et autres, à des centres de commandes centralisés ou à des bureaux de régulation.
  • Accessibilité de l’équipement à des fins d’entretien : on doit aussi concevoir les espaces pour permettre un accès facile à l’inspection, à la réparation ou au remplacement d’équipement.
  • Conformité réglementaire : on doit respecter les normes et réglementations en vigueur.

Quel rôle joue la technologie moderne dans l’amélioration de l’efficacité et de la fiabilité des systèmes de signalisation ferroviaires ?

Kulkjinder Singh, ingénieur en signalisation : La technologie moderne joue un rôle important dans l’amélioration de l’efficacité et de la fiabilité des systèmes de signalisation de trains. Elle rend les systèmes de signalisation plus sécuritaires et efficaces.

Les systèmes de signalisation numériques offrent des fonctionnalités qui n’étaient pas pratiques dans les anciens systèmes à relais ou les systèmes de signalisation précédents.

  • La logique de contrôle se révèle plus fiable, car elle s’appuie sur l’électronique plutôt que sur l’électromécanique, et parce qu’elle est souvent intégrée dans les sous-systèmes redondants. Donc, une défaillance dans un sous-système n’affectera pas les autres.
  • Les diagnostics en temps réel se trouvent localement et à distance pour améliorer le temps de réaction aux défaillances des équipements numériques et physiques.
  • Les diagnostics plus détaillés parfont l’analyse des événements des systèmes de signalisation ferroviaire et des systèmes non liés à la signalisation.
  • Les essais de préinstallation, l’installation et la mise en service s’effectuent plus efficacement avec les systèmes numériques par rapport aux systèmes de contrôle de trains à relais. Les changements d’ordre logique sont nécessaires et presque inévitables lors de la mise à niveau ou de la modification d’un enclenchement par logiciel plutôt que par câblage, ce qui constitue une méthode bien plus efficace.
  • Les fonctionnalités offertes dans certains systèmes numériques incluent les modifications automatiques de répartition, les interfaces avec les logiciels d’affectation des équipages, l’antiregroupement, l’indication sur les panneaux de commande des trains en retard ou les modes de routage automatique basés sur les interruptions de voie anticipées.
  • Les fonctions clés du suivi automatique des trains sont la supervision du fonctionnement et de la localisation, la commande automatique des itinéraires, etc.

Aux États-Unis, la Metropolitan Transportation Authority de la ville de New York a intégré le système de contrôle de train sur quelques lignes, dont Canarsie, Flushing, Culver et Queen, qui est partiellement construite. Les réseaux Long Island Rail Road et Metro-North Railroad ont implanté un système de commande intégrale des trains.

De quelles manières les systèmes de signalisation ferroviaire intègrent-ils des mécanismes pour atténuer les risques de pannes ou de dysfonctionnements des signaux pour veiller à la sécurité des passagers et employés ?

Jon Bisignano, ingénieur en signalisation : Les systèmes de signalisation sont généralement divisés en deux catégories de sous-systèmes : essentiels (liés à la sécurité) et non essentiels (non liés à la sécurité). L’intégration, l’entretien et la mise à l’essai de ces deux sous-systèmes sont différents.

Un système essentiel doit être conçu pour effectuer un arrêt d’urgence de façon sécuritaire après une défaillance ponctuelle de n’importe quel composant ou doit respecter un temps moyen spécifié entre les événements dangereux. Certaines portions des systèmes essentiels peuvent être examinées par des évaluateurs indépendants de la sécurité. Les chemins ferroviaires gouvernés par la Federal Railroad Administration (FRA) doivent satisfaire aux règles de sécurité « Subpart H—Standards for Processor-Based Signal and Train Control Systems » et au reste des exigences de la FRA.

Quels sont les défis et les aspects enrichissants de votre travail en tant qu’ingénieur en signalisation ?

Jon Bisignano, ingénieur en signalisation : Les plus grands défis comprennent les projets d’intégration de nouveaux systèmes de signalisation dans des systèmes existants. L’objectif est de réaliser ces projets en minimisant les interruptions de service, de satisfaire aux critères de sécurité et de gérer efficacement les coûts et les échéanciers.

Les aspects enrichissants de mon travail incluent l’utilisation de diverses technologies et la collaboration avec les expertes et experts du domaine. Un projet de signalisation typique peut comprendre des travaux sur les voies (sur les rails et sur la plateforme), la distribution de l’énergie de traction et des services publics, l’utilisation des dispositifs électromécaniques, pneumatiques et informatiques, ainsi que l’intégration des équipements de communication. Nous sommes notamment amenés à collaborer avec des responsables de la prestation de services et de l’entretien, des ingénieures et ingénieurs de voie, et parfois des ingénieures et ingénieurs en structure, ainsi que des évaluateurs de la sécurité indépendants, qui contribuent généralement aux intrants de conception. Dans les projets de signalisation, nous travaillons avec des ingénieures et des ingénieurs de différentes disciplines, d’EXP ou d’ailleurs.

Ce que je trouve le plus gratifiant dans mon travail, c’est d’améliorer la fiabilité, la sécurité ou la performance d’un chemin de fer en participant à la mise en place d’un système de signalisation.